samedi 10 janvier 2009

La résolution 1860 ou le degré zéro de l’efficacité

Les résolutions du Conseil de sécurité sur la Palestine se suivent et se ressemblent. Lorsque le Conseil arrive enfin, après de longues tractations et consultations informelles à surmonter la menace d’un veto américain contre toute condamnation ferme et énergique des pratiques israéliennes, à adopter une résolution, le résultat est dans tout les cas un texte incolore et inodore, sans aucune portée pratique.
Ce scénario s’est renouvelé pour la énième fois à l’occasion de l’adoption de la résolution 1860 (2009) relative à «la situation » à Gaza adoptée, après quatre jours d’intenses consultations, comme toujours par 14 voix et une abstention, celle bien évidemment des Etats-Unis.
Cette résolution bien terne, proposée par le Royaume Uni, à la suite des menaces de veto brandi contre le projet proposé par la délégation arabe, a été officiellement refusée par Israël, comme tant d’autres résolutions adoptées auparavant par le Conseil. En effet, et malgré l’adoption de la résolution, Israël continue allègrement son massacre, jusqu’à la réalisation, selon ses dires, des ses objectifs (!). Les condamnations quasi unanimes de la communauté internationale des Etats, exprimées au sein de Conseil de sécurité et ailleurs n’ont pas impressionné Israël. Les appels de détresse et des organisations humanitaires les plus objectives (CICR) ou la décision de l’UNRWA de suspendre ses activités n’ont trouvé aucun écho.
En réalité, la résolution 1860 contient en elle-même les prémisses de son échec.
Tout d’abord, il s’agit d’une résolution non contraignante qui n’a pas été adoptée en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations Unies relatif à l’action du Conseil en cas de rupture de la paix, de menace de rupture de la paix ou d’acte d’agression. Elle fait donc partie de cette série de résolutions exhortatoires qui ne font que lancer des appels et formuler des vœux et qui ne contiennent pas des mesures assurant leur effectivité.
Ensuite, la résolution ne contient aucune allusion aux crimes et violations flagrantes du droit international humanitaire dont les civils, les enfants, les femmes, les vieillards, le personnel de l’UNRWA, le personnel médical, les ambulances, les maisons d’habitation, les écoles, les lieux de culte, les hôpitaux etc. ont été les victimes. La résolution 1860 se contente dans don paragraphe 6 de « [condamner] toute violence et hostilité à l’encontre des civils, et tout acte de terrorisme », assimilant ainsi les roquettes artisanales aux effets limités tirés par les combattants palestiniens au formidable arsenal moderne et sophistiqué, à la pointe de la technologie destructrice, dont dispose Israël. La résolution place ainsi sur un pied d’égalité la victime et le bourreau.
Enfin, la résolution 1860 est un modèle d’ambigüité. Il est bien connu que tout texte international est le fruit d’un compromis et que de ce fait, certaines de ses expressions sont volontairement ambiguës. Mais la résolution 1860 a, semble t-il, battu tous les records en matière d’ambigüité et d’ambivalence. Chacune de ses expressions, chacune de ses phrases, chacun de ses six paragraphes est susceptible d’être compris et interprété de diverses manières. Par exemple, le premier paragraphe dans lequel le Conseil « appelle à un cessez-le-feu immédiat, durable et entièrement respecté, débouchant sur le retrait total des forces israéliennes de Gaza » ne dit pas mot sur les modalités de ce retrait des forces israéliennes et ne précise pas comment le cessez-le-feu va déboucher sur le retrait. La question est laissée en suspend.
Ainsi, la montagne a accouché d’une souris. La démarche arabe ramène de New York un texte qui a échoué avant même que son encre ait eu le temps de sécher. Il aurait été sûrement politiquement plus judicieux d’acculer le Conseil de sécurité à rejeter le projet de résolution arabe. Les choses auraient été plus limpides et la communauté internationale aurait été édifiée sur le degré de complicité entre Israël et les Etats-Unis. Cela aurait ouvert la voie à une démarche politiquement plus payante devant l’Assemblée générale.